[ Privé ] En scène !

[ Désolée pour le retard... Internet répondait aux abonnés absents hier. =_="
J'espère que ça te convient. N'hésite pas à me le dire sinon. ^_^ ]

Une fois n'était pas coutume : Mara avait décidé d'aborer fièrement les couleurs de sa maison et de sortir l'attirail de la parfaite préfète poudlardienne. Son choix s'était porté sur une simple robe de sorcière noire, soulignée par le col amidonné d'une chemise blanche où pendait une cravate route et or d'une banalité criante. Et pour ajouter une certaine touche d'excentricité dont la grecque n'aurait su se priver, Anthéamaëlys avait remplacé sa canne par un immense chapeau poitu à larges bords - accessoire passé de mode mais symbole intemporel des célèbres magiciens.

Délaissant rapidement les curiosités navales, la volubile préfète s'était montrée étrangement silencieuse et discrète, elle s'était échappée de la masse d'élève pour parcourir les profondeurs du phoenix. Elle avait entendu dire par un professeur qu'un théâtre se cachait dans les entrailles du navire et elle comptait bien trouver cette île aux merveilles avant toute chose. Avec un peu de chance, elle croiserait d'autres passionnés des mots et n'aurait pas à abandonner totalement ses vacances artistiques.

Demandant son chemin à un des membres de l'équipage qui sembla s'amuser de son style convenu, elle descendit un pont plus bas avant de tomber sur la fameuse porte - la troisième à droite après le vivarium, avait-il dit -. S'appuyant de tout son poids contre le vieux bois, elle poussa la porte qui grinça sa désapprobation et entra tout en prenant soin de refermer derrière elle.

Sans la moindre hésitation, Mara se dirigea jusqu'à la petite estrade qui ferait office de scène et ses chaussures à boucles claquèrent sur les planches usées par le temps tandis qu'elle marchait avec la contrariété de l'Armande des Femmes Savantes. Puis s'arrêtant brusquement, elle s'exclama pour un public et une Henriette qu'elle seule voyait :

- " Quand sur une personne on prétend se régler,
C'est par les beaux côtés qu'il lui faut ressembler ;
Et ce n'est point du tout la prendre pour modèle,
Ma sœur, que de tousser et de cracher comme elle. "

La réplique silencieuse d'Henriette faillit la faire mourir de rire, mais exercée depuis longtemps aux rôles de comédie, elle garda un masque de reproches à la perfection avant de répondre quelques instants plus tard :

- " Je vois que votre esprit ne peut être guéri
Du fol entêtement de vous faire un mari ;
Mais sachons, s'il vous plaît, qui vous songez à prendre... "

Son dernier vers mourut sur ses lèvres alors que la porte grinçait, annonçant on ne pouvait mieux l'arrivée de quelqu'un.

[l'est parfait ton message. en fait je m'inquiète plutôt pour le mien...XD]

Joel devrait se débrouiller seul, Louis l’avait laissé tomber pour une chasse aux souris.

"Bah moi les souris… non merci… vas-y mon Louis, ne t’inquiète surtout pas pour moi hein, je trouverai bien un truc à faire… Au pire, je grimperai au haut d’un mât et je ferai du bungee par le cou…"

Le chat était déjà bien loin et laissait un Joel qui se la jouait déprime à fond, seul au milieu d’un couloir du troisième étage du Phœnix avec pour seul public un marin qui passa près de lui en lui jetant un regard on ne peut plus interrogateur. Immobile, Joel demeura planté là, les bras mous le long de son long corps, la tête légèrement penchée vers une épaule et avec un air de chien battu sur son visage. Le marin tourna un coin, Joel s’éveilla, du moins en partie. Pivotant sur ses talons sans bouger le reste de son corps et gardant la même moue, il fit face à la porte qui se trouvait à gauche. Lentement, sa tête se redressa sur son cou et le chien battu céda sa place à un Joel intrigué. Un regard furtif à sa gauche, puis à sa droite. Personne à l’horizon, allons-y!

"Oh-my-God."

Le trésor qu’il découvrit là mesdames et messieurs! Un costumier. Un vrai de vrai avec des grands chapeaux poilus, pointus, multicolores et de toutes les formes, des robes, des pantalons, des salopettes, des chemises, des perruques et tout le tralala! Joel disparu parmi les tissus de toutes les couleurs et lorsqu’il resurgit au milieu de ce grand placard, il était accoutré d’une façon plutôt originale et même peut-être légèrement marginale. Une description s’impose. Joel se mit à parader sur un catwalk imaginaire, posant ici et là, faisant des clins d’œil aux journalistes et admirateurs tout aussi imaginaires mais oh! combien réels dans sa petite de tête.
La voix d’un commentateur un peu excessif dans l’art de l’intonation surgit dans Joel Land.

« Mais quelles bottes fantastiques! Le voilà ready pour la saison des pluies! Et puis ce short, my my!, innovateur et de très bon goût, rayé rouge et blanc… C’est chic! Les ailes d'anges, alors la c’est la crème de la crème! Very interesting! Quoi qu'un peu maigrichon et blême le gaillard... Un t-shirt n'aurait peut-être pas été de trop! Bref... Et finally, le top du top! Ce chapeau qui nous rappelle les bûcherons de la Nouvelle-France, on sent le raton laveur dans l’œuvre! I love it! »

Sur ces belles paroles, Joel le playboy poussa une nouvelle porte et une fois celle-ci ouverte, il posa dans le cadre une dernière fois pour ses spectateurs, posant une main derrière sa nuque, élevant le menton vers les cieux, se déhanchant et lançant un de ces regards de top modèle à… une jeune fille qui se trouvait sur une scène à quelques mètres devant lui. Les « spotlights » dans sa tête s’éteignirent aussitôt et furent remplacés par l’éclairage qui régnait dans le théâtre.
Wow… Un vrai théâtre. Joel abandonna le top modèle en lui et, la bouche entre ouverte (ce qui lui donnait des airs un peu bêta) il eut un regard panoramique pour l’endroit. Il sourit. Il devait avoir trouvé un étage du paradis. Il posa ses mains sur ses hanches, content, puis regarda la demoiselle.

"Dites donc, mademoiselle la sorcière, à quel étage sommes-nous?"

Il avança dans l’allée centrale en direction de la scène, continuant son discours.

"J’avais dans l’idée de me rendre au 7e, seulement je crois l’avoir manqué…"

Il se trouvait désormais juste en bas de la scène, sur laquelle il appuya ses mains et prit un air franchement concerné.

"Voyez-vous, je suis un coureur des bois et, en tentant de couper un arbre afin de m’en faire un canot et bien, j’ai un peu… manqué mon cou et puis, sans le vouloir évidemment, je me suis tranchée la tête. Heureusement vous avez de la colle pour ça ici haut, au paradis. Ou alors ici-bas... Soudain, il parut effrayé et fit un pas vers l’arrière. À moins que… à moins que je ne sois point… au paradis!? L’air inquisiteur. Dites-moi, les sorcières sont-elles admises dans l’au-delà?"

[ Il est très bien ton message. ^_^ Le mien, par contre, va être plus court mdr. ]

Les mots moururent, fauchés en plein air par l’arrivée de Joel tandis qu’un rire chatouillait sa langue, tentant de franchir ses lèvres. La tenue du Poufsouffle avait de quoi marquer les esprits. En bien comme en mal. Fort heureusement – ou peut-être pas –, les vêtements dépareillés du sorcier ne provoquèrent qu’amusement. En plus, il avait un regard totalement émerveillé et chaque personne qui aimait – même un peu – le théâtre et les costumes trouvaient grâce aux yeux de Mara. Celle-ci s’était d’ailleurs avancée d’un pas presque gambadant jusqu’au bord de la scène.

- " Oui, je crois aussi. Ici, c’est au moins le dixième Ciel. " sourit-elle en s’accroupissant, son visage à hauteur de celui de Joel.

Son expression était celle d’un adulte questionnant patiemment un enfant extravagant tandis qu’elle détaillait le visage qui se cachait tant bien que mal derrière un raton-laveur arrangé en chapeau.

- " Oh, vous savez… les décapités sont si rares à notre époque – ces barbares modernes tuent les gens avec des chaises eklectrik, vous vous rendez compte ? et l’honneur de la lame alors ? " Le ton était monté graduellement dans l’échelle de l’indignation avant qu’elle n’ajoute un peu plus bas, un sourire indulgent flottant sur ses lèvres : " Mais peut-être qu’en allant chez Holopherne nous pourrons trouver de quoi arranger ça. Ce tyran pique toujours toute la colle ! "

Soudain, Mara fit une moue affolée et plaqua précipitemment sa main sur la bouche de Joel :

" Mais chuuuteuh ! Faut pas le dire ! " geignit-elle, avec un ton agacé que démentait ses yeux rieurs.

Enfonçant son couvre chef d’avantage sur sa tête, elle rabattit un des bords qui jeta une ombre sur son visage. Elle se pencha plus en avant, sa bouche juste à côté de l'oreille du sorcier et murmura du ton de la confidence :

- " Je suis clandestine ici : Vous voyez ? Rhadamanthe n’a pas aimé que je lui conseille de mettre un peu de couleur dans sa robe et il m’a envoyé dans la Plaine des Asphodèles plutôt qu’aux Champs Elysées. " Et se redressant, elle ajouta tout haut : " C'est injuste, n'est-ce pas ? "

[c’est pas la quantité qui compte, mais plutôt la qualité et donc je n’ai rien à redire ^^ ]

Le dixième ciel!
Joel acquiesça d’un air approbateur et quelque peu étonné, apparemment, le dixième, ca lui allait très bien, au coureur des bois.
Écoutant attentivement les dires de Mara, Joel se rapprocha, semblant tout à fait intéressé et en approbation totale avec ce qu’elle avançait. Un peu plus et il brandissait son poing haut et fort, revendiquant les droits de lame à son tour. En tant que bûcheron il se devait de défendre sa tendre amie…
Holopherne, Holopherne… Joel dut puiser dans sa mémoire pour mettre le doigt sur la tête. Ah ben oui, la jolie Judith elle lui avait tranché la tête à ce gros balourd!
À son tour, Joel parut paniqué lorsque la main de Mara se posa sur ses lèvres. Il ouvrit de grands yeux puis acquiesça en hochant vigoureusement la tête plutôt trois fois qu’une.

"Oh! Mais quelle horreur! Fit-il en rendant l’outrage de façon fort juste. Ca fera les gros titres chez les morts : Scandale, Rhadamanthe s’habille mal!"

Joel mima avec ses mains une pancarte imaginaire, soulignant un titre tout aussi invisible, puis croisa ses bras sur son torse dénudé et baissa la tête, l’air découragé. Le poil de son chapeau masqua complètement ses yeux, ainsi incliné.

"Et moi qui croyait être soulagé de ce genre de mollusque ici-haut…" Éclair de génie, en herbe, Joel redressa soudainement sa tête et leva un index vers le ciel.

"Je sais!"

Sur cette révélation plutôt modeste dans son genre, Joel posa ses mains sur la scène et se hissa aux côtés de Mara. Il marcha vers le centre de la scène, demeurant davantage du côté jardin cependant, et tout en regardant Mara, il exposa son idée du siècle en appuyant presque chacune de ses paroles par de grands gestes et des expressions faciales dignes du cinéma muet…

"En arrivant ici, Saint-Pierre m’a confisqué ma hache, seulement je n’aurai qu’à redescendre, récupérer ma hache et si Saint-Pierre me la refuse, alors je lui pêcherai un poisson, lui qui aimait bien pêcher jadis, il acceptera sans doute l’échange. Une fois ma hache récupérée, je remonterai par les nuages, il se mit à monter un escalier imaginaire, faisant gaffe à ne pas se faire trop bruyant, chose qui s’avéra difficile vu les trop grandes bottes jaunes de plastique qu’il portait dans ses pieds, et j’irai l’abattre d’un coup de hache, ce Rhadamanthe!" Du coup Joel fit un bond et retomba sur ses deux pieds écartés en un bruit sourd, tout en mimant un puissant coup de hache à l’horizontal. Le chapeau lui retomba sur les yeux, il le remonta d’un geste furtif, découvrant ses yeux et le haut de sa tête, de là s’échappèrent d’ailleurs plusieurs mèches de cheveux qui lui tombèrent devant les yeux.

Alors, il changea complètement de ton, posant sa hache imaginaire sur son épaule et mettant son poids sur l’une de ses jambes, prenant une pose « déhanchée-explicative » dans le sens, dans le but de donner des explications, voire de faire éloge à sa propre personne un peu à la manière d’un enfant, c’est-à-dire sans subtilité aucune.

"Vous avez déjà abattu des arbres mademoiselle la sorcière? Parce que si oui… vous devez savoir qu’il faut des bras d’aciers. Et comme pour appuyer ses paroles, il leva son bras droit à la manière d’un monsieur muscles seulement, Joel n’avait absolument rien à gonfler là… Il reposa sa main sur sa hanche, feignant un léger embarras dût à sa démonstration d’absence de muscles. Bref, vous n’avez qu’à demander et je la lui trancherai sa grosse tête vide!" Conclut-il en brandissant sa hache imaginaire dans les airs.

" Et bien entendu, ceci n’est qu’un prétexte pour dénigrer mes pairs et moi-même. Cet homme est d’une cruauté ! " s’indigna la jeune hellénique avec un haussement d’épaule désespéré.

Le regard de Mara s’illumina d’intérêt alors que le coureur des bois venait la rejoindre sur sa falaise à la seule force de ses bras. Elle ne savait absolument pas qui pouvait bien être ce Saint Pierre – née sorcière dans une famille de sorciers, elle ne connaissait absolument rien des mythes chrétiens – mais elle eut peur de voir où son chevalier servant voulait en venir avec sa hache. Se mordant la lèvre inférieure avec une mimique inquiète, elle attendit tout de même la fin du récit avant de se jeter sur Joel. Son chapeau alla choir sur le sol, délivrant multitude de fils d’or et se pendant à son bras levé, elle s’exclama avec le désespoir d’une dame des récits courtois :

- " Non non, surtout pas ! Je suis sûre que vous en seriez parfaitement capable mais Rhadamanthe est un dieu : il vous damnerait pour pareille faute. Je m’en voudrais de vous envoyer droit dans le Tartare ! Ne vous souciez pas de mon sort… je saurais bien m’attirer la faveur de Minos : il est friand de théâtre ! "

Ce jeune homme était bien sympathique mais il n’avait pas bien l’air de réaliser la gravité de la situation… Aller décapiter un dieu, quelle idée saugrenue tout de même ! Ces jeunes étaient bien étranges par Zeus pour accepter de faire envoyer tout droit jusqu'au Tartare, summum du mauvais goût - c'était tout de pierre noire là bas... quelle tristesse -. Ceci dit, le coureur des bois avait la tête tranchée, on ne pouvait pas lui reprocher complètement ses paroles insensées.

Et se penchant de nouveau vers Joel, elle lui glissa avec un hochement de tête des plus explicites : " Même si, soit dit en nous, il n’est pas un expert en la matière. Il a autant de délicatesse et de sensibilité qu’un satyre : préférer Pan à Apollon, quel manque de goût ! "

Ses mains s'animèrent, décrivant en larges courbes son incompréhension tandis qu'elle parlait, avant de retomber le long de son corps. Haussant une épaule, elle arqua un sourcil comme si devoir jouer une mauvaise pièce pour le plaisir d'un satyre déifié était la pire hérésie du monde.

- " Mais ne parlons plus de détails qui fâchent ! Il faut trouver cette colle sinon vous perdrez définitivement la tête ! "

Et comment qu’il en serait capable! En entendant ses mots de la bouche de la demoiselle en détresse - une demoiselle en détresse, c’est toujours bien dans les tragédies… - Joel se bomba le torse, mais celui-ci se dégonfla vite fait vu la suite de la réplique de Mara. Quand même, peut-être que se mesurer à un dieu c’était un peu, juste un tout petit peu, poussé. À regrets, Joel abandonna donc l’idée de décapiter Rhadamanthe. Tant pis pour la hache, il pourrait toujours offrir ses services comme coiffeur de nuages.

"Et bien alors, jouons-lui une scène, à ce Minos! Déclara un désormais fort enjoué coureur des bois, ouvrant les bras et affichant un large sourire. Puis, laissant tomber ses bras le long de son corps, prenant un air affligé. C’est que, les arbres à abattre sont pas trop nombreux dans le coin… C’est aussi que, je m’ennui un peu quand même… Et si j’pouvais vous être utile, même le temps d’un dixième de seconde, et ben déjà j’aurais un dixième de seconde écoulé sur l’éternité qu’il me reste, ‘voyez?"

Haussant les sourcils et prenant un air étonné, il acquiesça à l’affirmation de la jeune fille. Se donnant des airs hautains, il répéta.

"Quel manque de goût, vraiment. À croire qu’il n’a pas toute sa tête… Se penchant vers Mara en ayant l’air complice. Et croyez-moi, j’en connais un rayon sur le sujet!"

Ah oui vraiment, Pan et Apollon, c’était deux mondes… Seulement Pan… C’était celui avec des pattes de chèvres non? Et Apollon, le sex-symbol chez les dieux n’est-ce pas? Quel bûcheron cultivé ce Joel! Et quel plaisir il avait à pouvoir partager non-seulement son petit bagage culturel – à vrai dire ça il s’en fichait – mais également son amooouuur du jeu. Quel bonheur que de laisser parler le monde qui grouille au fond d’un cerveau la majeure partie du temps réduit en sourdine! Voilà le bonheur des vacances, le temps. Le temps de changer les répliques.

"Ah oui, la colle!" Fit-il en élevant son index, l’ayant réellement oubliée, cette colle, l’espace d’un moment.

Il posa son index sur son menton, l’air pensif, puis baissa les yeux vers Mara.

"Et Holopherne, vous croyez qu’il voudra bien me la prêter cette colle? Il se massa le cou d’une main. J’ai bien l’impression que ca ne tiendra pas encore très longtemps. J’ai la tête qui penche un peu vers la droite… Il pencha la tête vers la droite. Je vais la perdre, je vais la perdre toute, cette trop lourde tête! Et de nouveau Joel parut songeur, seulement cette fois il sembla attraper une ingénieuse idée. À moins que… À moins qu’on ne la vide un peu, cette tête! Alors la terre n’en voudrait sans doute plus! Suffirait de m’ouvrir le crâne avec ma hache et de laisser s’échapper quelques pensées inutiles…"