Arithmancie: Allez hop! Tous au bouloooooot!

Ronde... la pièce était ronde... les tables, installées en arc de ciel jusqu'à la moitié de la pièce, était toutes tournées dans le même sens, vers une table plus haute, tout à fait adaptée à la morphologie de Miss Karolina Klimt, tenant lieu de bureau et un immense tableau noir, long d'au moins six mètres, et haut d'environ deux mètres. A côté de ce dernier, cloué au mur, une gravure blanc et ocre représentait un homme chevelu et barbu, au nez prolongeant son front. Sous le portrait, en lettres resplendissantes de cuivre et de chrome, étaient inscrit un Pi, un Upsilon, un Théta, un Alpha, un Gamma, un Oméga, un Rho et un Epsilon, formant le mot PYTHAGORE. La gravure avait l'air moldue... le visage, comme celui de tous les tableaux moldus, restait statique, et rien ne bougeait d'un cil... c'était typique des moldus, à l'exception près de "La Jucunda", tableau datant de la Renaissance dans lequelle le peintre, très ingénieux, a sut donné l'illusion du mouvement des yeux.
Les autres murs de la pièce étaient tapissés de suites de chiffres et de nombres, rendues illisibles par leur ésotérisme, ainsi que par d'autres tableaux, ceux-ci, magiques, représentant des scènes magiques de l'Antiquité Greco-Romaine.
Sur le haut bureau était posée une immense pile de livres, vascillante, à côté de laquelle, deux tas de feuilles prenaient place. La semi-géante s'en approcha, d'un pas sûr. Heureusement que sa collègue de Botanie lui vait préscrit la Pimentine et l'essence d'ellébore quand elle lui avait rendu visite au Chemin de Traverse, sinon, non seulement elle resterait sans bouger, là, plantée comme un piquet, mais en plus, elle serait en train de retapisser les murs si charmants de la pièce.
Arrivée au bureau, la femme ne s'assit pas. Elle prit une craie de couleur blanche, qui roulait d'un côté à l'autre du meuble, et, sur le long tableau noir, commença à tracer une grille. Karolina avait toujours préféré écrire elle même ses cours. Les sorts de lévitation n'étaient pas son fort, elle préfèrait les chiffres, ça volait moins facilement, surtout scotchés sur un tableau, et en plus, rien que de voir voleter les petits morceaux de calcaire, la semi-géante en avait des hauts le coeur. Depuis gamine, elle avait le mal de l'air: le fait seul de penser aux cours de vols lui donnait des nausées, et dès qu'elle enfourchait un balai -bien que sa mère lui en ait acheté un dans les soldes et expédié par hibou pour ses dix-sept ans-, mieux valait s'écarter de la grande demoiselle, d'au moins deux mètres... sous peine d'envoyer immédiatement sa cape et sa robe chez un teinturier.
Tandis qu'elle traçait sa grille de trente-six cases et commençait à écrire dans la première ligne les chiffres de un à neuf, compris, et commença à réfléchir...

*Cette poièce est vraaaaaaaaaaaaiment parfaite pour mon cours... La dispoooooosition, la dééééécoration, même les meubles sont adaptés à ma morphooooooologie!*

Calligraphiant un B aux volutes fines et généreuses dans la seconde case de la deuxième ligne, Karolina fit soudain le rapprochement.

*Ah ha! Evidemmeeeeeeent! Cette pièce a sûrement un fonctionnement analogique à celui de la salle sur demande à Poudlaaaaaaaard!*

Sa main gauche se leva vers sa bouche, l'habitude, pour tirer une bouffée sur sa pipe... mais pipe il n'y avait pas. Déçue, la professeur se remémora les consigne de la jeune directrice de l'établissement: il est FORMELLEMENT interdit de fumer à bord du Phoenix -histoire d'incendie, d'inconscience et de contamination de poumons, quelque chose dans le genre- exception faite du pont, à l'air libre! Miss Klimt ne pouvait s'imaginer ne pas fumer pendant son cours -ça lui remettait les idées en place, façon de parler...- et elle croisait les doigts pour quelle ne fasse pas une de ses crises de manque en pleine leçon sur le calcul des nombres d'espression...
Une fois sa grille remplie de la façon suivante:

1 2 3 4 5 6 7 8 9
A B C D E F G H I
J K L M N O P Q R
S T U V W X Y Z

Elle ajouta la touche finale en écrivant en lettres gothiques "Alphabet de Tripoli", puis s'assit enfin. Croisant les jambes, elle posa sa tête dans ses mains, fixant attentivement et sans sciller la porte en bois, ouverte sur le couloir. Elle retira l'étoffe en fourrure qu'elle portait sur ses épaules -il fait toujours plus froid en altitude, même au beau milieu de l'été-, et tira quelques peu sur sa robe noire en soie, brodée de lotus, pour remonter le pan jusqu'à ses genoux.

*J'espère qu'il y auraaaaaaaaa du monde... si il manque un seul de mes élèves habituellement en Ariiiiithmancie, je les pend par dessus bord par les chevilles... même si ce n'est pluuuuuuus légal...*

Peu importe l’heure qu’il est, peu importe la position de la planète sur son orbite, Joel Blackburn est mort, il en est ainsi et pas autrement. Bientôt cependant, il ressuscitera, tel un divin personnage, et ses disciples le suivront pour une marche merveilleuse vers le pays du Miracle. Le suivront de leur gracieuse démarche de ballerines stylées les chats, tous sans exception aucune, les félins suivront leur guide vers la lumière éternelle, JoelLand les attend. Poissons et lait à volonté… Quel saint ce Joel, vraiment. Seulement en attendant cette glorieuse heure, il faut être dignement mort. Étendu sur ce qui lui sert de lit, de mort pour l’occasion, les mains jointes et sagement posées sur son torse, derrière ses gargantuesques lunettes teintées Joel a les paupières closes depuis plusieurs heures déjà, oh oui plusieurs heures… mais je ne saurais dire combien… De toute façon, quelle importance! Au-cune. Le temps est l’un des martyrs que Joel décapite à mains nues à chaque jour, à chaque matin lorsque le réveil sonne…

"MIIIIIIIAAAAAAAWWW MIIIIIIAAAAAWWW MIIIIIIIIAAAAAAWWW MI-"

Une main vint s’abattre sur une tête de chat en plastique qui, plutôt d’avoir des moustaches, avait des aiguilles d’horloges. Aussitôt le miaulement s’interrompit pour faire place à un…

"Mmmmm…" déclaré par le messie, assis sur le bord de son lit en massant de ses poings ses paupières alourdies, désormais démasquées de leur armure solaire qui trôna bien vite en couronne sur la tête de Saint-Joel.

Il se leva, l’auréolé, une fois ses yeux bien rougis, une fois ses sclérotiques bien écorchées par les fractions de poussière demeurées sous la couverture que représentaient les paupières de monsieur. Il se leva donc, s’étira avec la souplesse de Louis, et traîna sa carcasse jusqu’à une salle de bain, jusqu’à une glace.
Oooooh! Quelle horreur ce miroir renvoya-t-il à ce pauvre Joel. Aussi bien remettre ses binocles dignes d’un aviateur, ou d’une mouche, sur ces deux… choses que jadis il put appeler ses yeux. Il replaça son écharpe d’un geste digne d’une diva, défroissa en moins de deux son t-shirt et reboutonna son jean qui, malencontreusement, vu la quantité de nourriture ingurgitée la veille, avait dut faire place à un gonflant estomac. Tout cela accompli, Joel s’engouffra alors dans les couloirs du bateau, ayant en tête un but tout à fait précis.
Fan incontesté de Double K, Joel ne manquait pas un seul cours d’arithmancie. Non, jamais, au grand jamais, jamais de jamais. Il se l’était promis à lui-même et, jusqu'à présent, il n’avait point faillit à sa promesse. D’un pas sûr, portant sur son épaule un vieux sac de cuir pour porter ses livres, le grand Joel entra dans le temple du chiffre et avança, avança, avança parmi les tables et les chaises, les yeux rivés au bureau qui trônait en maître au centre de l’endroit. Il s’arrêta d’ailleurs face à celui-ci et, derrière leur armure teintée qui renvoyait l’image de quiconque portait le regard sur elle, les yeux de Joel s’accrochèrent à ceux de son enseignante préféré. Il plia l’échine en guise de salutation, se redressa.

"Quel plaisir de vous savoir parmi nous pour ce périple, miss Klimt! Il retira ses lunettes, dévoilant des yeux qui menaçaient de se mettre à pisser le sang, pardonnez-moi l’expression… Et porta son attention sur le portrait du brillant barbu en s’en approchant quelque peu. Content de voir que vous faites partie du voyage aussi." Dit-il, tout aussi sérieux.

Sur ce il tourna les talons et prit place à l’une des tables à l’extrême gauche de la salle. Joel remit ses lunettes devant ses yeux de démon et sortit de son sac un rouleau de parchemin ainsi qu’une plume. Ensuite, il appuya son visage dans ses mains à son tour, et profita du camouflage que lui offrait ses lunettes pour admirer en toute discrétion la colossale professeure.

"Aaaaaaaaaaaah" fit Karolina Klimt sur un ton de soulagement et de satisfaction.

Monsieur Joel Blackburn venait d'arriver à son cours, et s'était directement dirigé vers elle. Faisant preuve d'une grande politesse, il s'inclina devant la professeur assise, retira ses lunettes pour la saluer, puis alla s'installer dans le calme, sortant de quoi prendre notes. Joel Blackburn... Tant de bon souvenir pour Miss Klimt. Le jeune homme de Poufsouffle était l'un, si ce n'était LE meilleur de ses élèves. Toujours de bonne humeur, il était peut-être bien le chouchou de la professeur d'Arithmancie. Jamais, depuis son entrée en troisième année, Karolina ne l'avait noté absent, même les jours où il était malade, il défiait la maladie pour venir, et resplendissait, ce qui enjouait sa professeur plus que tout!
Karolina était vraiment heureuse de voir Joel ici. Lui qui était si bon dans sa matière n'avait aucunement besoin d'assister aux cours de rattrapage. Mais il semblait tellement passionné par l'Arithmancie, que ça lui faisait chaud au coeur.
La semi-géante décroisa les jambe, recula la chaise de son bureau, et se dressa du haut de ses deux mètres dix, attrappant au passage un des lourds volumes de la colonne vascillante. D'une démarche élègante, elle se dirigea vers la table à l'extrême gauche de la salle, laissant dans son sillage une douce odeur de cannelle et d'orange. Arrivée devant son élève, elle déposa le livre sur le petit bureau et se baissa à la hauteur de son élève, les avants-bras posés sur le bois, le dos cambré et les jambes croisées.

"Monsieur Blackburn, quelle joie de vous voir assister à mon cours de rattrapaaaaaaaage, vous qui n'en n'avez nuuuuuullement besoin!"

Sa main droite se leva et caressa la joue de l'adolescent.

"Vous auriez pu rester traîneeeeer sur le pont ou à Neveeeeerland par cette merveilleuse journée ensoleillée!"

Seul son index touchait le visage du jeune homme à présent. Le doigt, appuyé sous le menton de celui-ci le faisait relever la tête, et, malgré les lunettes du Joel, le regard de la Roumaine était fixé sur ses pupilles.

"Très bien... Vous êêêêêêêtes le seul pour le moment, mais les autres ne sauraient tardé je peeeeense..."

Se redressant, elle tourna le dos à l'élève et retourna vers son burea. A mi-chemin, tout en continuer de marcher, elle ajouta:

"Joel, vous voudrez bien retireeeeeez vos verres avant que le cours ne commence, je vous priiiie."

Le ton était amical, mais ne laissait de place à aucune autre alternative. Joel se souvenait sûrement de Terrence Rabatay, un jeune élève un an plus jeune que Joel, qui avai oser mâcher du chewing-gum durant son premier cours d'Arithmancie...
Karolina se remit assise et se plongea dans un des deux paquets de feuilles posés sur la table, attendant que d'autres élèves arrivent...

"Mmmm..."

Il en ferma les yeux, pour mieux sentir, mieux inhaler ce parfum qui s’éveillait alors que Karolina Klimt se levait pour venir le rejoindre. Les narines dilatées, il aspira ce parfum avec gourmandise, le laissant l’emplir, le saouler, rendre ivres ses sens en libérant ses pensées. Joel s’imagina du coup étendu sous un oranger dans un paysage campagnard, un bâton de cannelle aux lèvres, et miss Klimt assise à ses côtés, lui caressant tendrement la joue...
Oh bon sang! Mais il ne rêvait pas, elle était vraiment là, tout près, avec sa main, sa main à elle, sur sa joue...à lui. Sur ses fines lèvres se traça un discret sourire gaga.
Si elle savait à quel point il était plus agréable pour Joel de passer du temps ici, en sa compagnie, plutôt qu’en la compagnie des trop nombreux élèves de Poudlard. À l’exception de quelques-uns, Joel ne s’entendait pas particulièrement bien avec tout le monde. Non, en fait, c’était plutôt tout le monde qui ne s’entendait pas particulièrement bien avec lui. On le trouvait sympathique le temps de quelques semaines, quelques mois, puis on se tannait. Joel était drôle un moment, amusant, divertissant, mais finalement cela devenait quelque peu ennuyant lorsque l’on se rendait compte qu’il était vraiment “comme ça”, que c’était pas seulement par moments d’inspirations, pour être drôle et amical.

Il lui aurait bien dit, à quel point il était heureux d’être là dans la classe d’arithmancie, seulement ce parfum, ce doigt sur sa peau, ces iris noisette plantés sur les siens...
La voilà qui repartait vers son bureau. Allons, allons! Un peu de tenue cher Joel! Il était temps de se reprendre. Cher Joel se reprit alors, son sourire retrouva sa légèreté, sa voix sa convenance. Il retira ses lunettes, dévoilant du coup des yeux qui donnaient l’impression de ne pas s’être vus recouverts de paupières pendant des années. Il posa ses lunettes sur le coin de son bureau puis, tout en prenant la parole, les poussa doucement du bout de son index afin de les orienter d’une façon très particulière.

“En fait, professeur, j’ai déjà visité Neverland bon nombre de fois et, à vrai dire, je préfère conserver de cette île les souvenirs que j’en ai avant qu’elle ne soit entachée par mes trop nombreux compères...”

Voilà, les verres étaient orientés de façon à ce que le visage de miss Klimt y apparaissait. Dans ces deux petits miroirs, Joel pouvait désormais admirer, encore une fois de façon plutôt subtile, sa tant-aimée déesse des chiffres. Le visage appuyé dans sa main droite, le bras du même côté accoudé sur la surface plane du pupitre, il était retourné en son champ d’orangers lorsqu'un bruit le fit revenir sur le Phoenix. Un autre élève! Quel dommage... Adieu le tête-à-tête avec miss Klimt... Et c’était pas n’importe quel élève qui venait d’entrer en plus... Yann Laverton-West, un préfet... Et puis qu’est-ce qu’il faisait ici? Il était pas doué à l’école!?
Bref, pas la peine de s’éterniser sur le sujet, Joel se désintéressa de l'élève et se mit à griffonner sur son parchemin des nombres, des lettres... Tout en ayant de temps à autre un regard pour Karolina Klimt, soit au travers de ses verres, soit directement en la regardant. Ainsi attendit-il que le cours commence.

Un bruit, des chocs légers contre la porte extirpèrent Karolin de ses feuilles. Elle releva la tête pour voir qui arrivait... Ah...

"Ne fermez pas la porte je vous prie..." dit Karolina Klimt d'un ton neutre.

Yann Laverton-West entra dans la pièce... Yann... un garçon pas très grand pour son ange et chauve... Karolina ne l'avait jamais vraiment aimé. Il se prenait trop pour quelqu'un d'important, et pensait être l'un de ses meilleurs élèves. Pourtant, il n'excellait pas en Arihmancie, et c'est ce qui était le plus important pour Karolina. En théorie, Yann était bon en Arithmancie... ses notes étaient bonnes, pas Optimales, mais le cours était bêtement appris, ça se voyait. Il n'y avait pas d'originalité dans ses devoirs, pas de fantaisie... Joel, lui était quelqu'un de vraiment doué. Karolina lui promettait un bel avenir si il s'orientait vers l'Arithmancie. Ses prédictions étaient toujours un délice à entendre, les calculs coïncidaient toujours,...

*et sa voix est si douce et su... voyoooooons Karolina...*

Secouant rapidement la tête pour reprendre ses esprits, la Roumaine répondit au salut de Yann.

"Bonjoooour Monsieur Laverton-Wesssssssst."

Il n'yavait plus l'entrain que l'on distingait dans sa voix au moment où Joel était entré... La semi-géante baissa son regard vers ses feuilles, jetant un regard de remerciement à ce dernier qui avait ôté ses lunettes, et les avait posées en biais sur sa table.

Miss Klimt classait le genre humain en cinq groupes.
Le premier englobait les moldus, qui pour la plupart, ne connaissaient même pas l'existence de sa matière... C'était d'ailleurs le groupe le plus important.
Le second, les sorciers qui ne pratiquaient pas l'arithmancie. Elle les considérait comme les personnes les plus fénéantes du monde magique, et les plus idiotes! Pourquoi ne profitaient-ils pas de l'opportunité de pouvoir étudier une matière si intéressante?
Le troisième groupe, lui, regroupait ceux qui faisaient de l'arithmancie par obligation. La plupart du temps, il restaient là, à contempler le plafond, à faire des avions en papier où à dévisager leur professeur avec des yeux de merlan frit... Ceux-là importaient peu à Karolina. Autant, elle les plaignait d'être forcés, au tant, elle était reconnaissante envers leurs parents qui EUX devaient être passionnés par sa matière... Elle pensait toujours à les inviter aux réunions parents-profs pour s'entretenir sur l'Arithmancie... Bizarrement, la moitié de leurs enfants ne suivaient plus son options les années suivantes...
Le quatrième, englobait les élèves qui faisaient de l'arithmancie et le cinquième, ceux qui pratiquaient l'arithmancie!
Yann appartenait au quatrième groupe, comme Ruby McFarlane et d'autres de ses élèves ambitieux qui ne suivaient son cours, selon elle, que pour s'assurer un avenir... C'était ce groupe qui posait le plus de difficultés au professeur, à vrai dire. Ils avaient le mérite d'être bons en Arithmancie, ils avaient le mérite de participer au cours... Mais il manquait toujours quelque chose, le petit truc qui fait la différence entre le très bon élève et le génie... comme Joel. Ah... Joel! karolina en rêvait parfois, elle se voyait avec Joel, seuls dans une vaste pièce aux murs recouverts de tableaux sur lesquels ils pourraient écrire des calculs, tout en gambadant! Du plafond tomberaient prédictions et suites de nombres en une farandole d'arabesques, et tous deux les interprèteraient en dansant sous cette pluie formidable! Main dans la main, il tournoieraient des heures durant jusqu'au petit matin, au moment ou la rosée sur leur visage viendrait leur annoncer qu'il était l'heure de...

"Rrrrrrrrrreprendre ses esprits!"

Les mots étaient sortis de sa bouche sans qu'elle l'ait désiré, avaient brisés le quasi-silence -seul les grattements de la plume de Joel sur ses parchemins se faisaient entendre- et l'avaient sortie de ses rêveries. Elle vit yann, assis non loin d'elle, à la seconde rangée de tables...

"hum hum... Monsieur Laverton-West, leveeeez-vous et prenez un des ouvrages... et s'iiiil-vous plaît... CESSEZ DE ME REGARDEZ AINSIIIIIIIIIIIII!"

Son index droit se posa avec violence sur le sommet de la tour de livres.

"Et prenez ceci, ajouta-t-elle en tendant par-dessus le bureau deux feuilles qu'elle avait saisies dans la pile à sa droite. Vous aurez l'oooooobligeance d'en donner une à votre camarde, je vous priiiiie..."

Elle ponctua sa phrase d'un regard sombre à l'élève en face d'elle, et d'un large sourire à l'adresse de celui qui était toujours aussi be... toujours assis à sa table.

"merlin, merlin, merlin, merlin, merlin!"

Takoru courait dans les couloirs du bateau, au deuxième étage. Il passait à présent devant les appartements des préfets et le salon, sa montre à gousset pendant de la poche avant droite de son jean ballotant en tous sens. Neuf heures vingt-cinq et treize... quatorze secondes... Il aurait déjà dû être arrivé à son cours d'Arithmancie depuis plus de cinq minutes! Il allait se faire tuer par Mademoiselle Klimt, cette folle lui ferait sûrement manger un ou deux rouleaux de parchemins par les narines...! Tako activa la cadence, descendant les marches quatre à quatre jusqu'au troisième étage. Il avait pourtant été réveillé à six heures par ce bruit sourd de provenance inconnu -en réalité, un convoi d'oies cendrées volant à altitude trop élevée été entré en collision avec la proue du Phoenix, dans un nuage de plume et une pluie de sang- mais le cours d'arithmancie ne commencerait pas avant neuf heures vingt... Trois heures de sommeil, c'est pas négligeable! C'est pourquoi Takoru retourna dans les bras de Morphée, confiant à Koshi, sa reinette, la lourde tâche, que dis-je! ZE mission of ze siècle: le réveiller à neuf heures!



"Quand la grande aiguille arrive là, et la petite, ici!" Avait-il expliqué à son animal.

Le batracien avait acquiessé en clignant des yeux, puis s'était placée au dessus de la montre, à l'affût du moindre mouvement d'aiguille.

9h01...
9h05...
9h08...
9h15...

"AAAAH!"

Takoru se réveilla en sursaut. La chambre été vide, et lui était trempé de sueur.

"Punaise... je mangerai plus jamais de fromage avant de dormir!"

Il s'étira et baîlla bruyamment. Ses yeux se tournèrent ensuite vers l'emplacement où il avait posé sa montre et vit Koshi assoupie, sur le cadran. N'était-elle pas adorablement mignonne lorsqu'elle dormait?
Takoru souleva délicatement la grenouille et se saisit de sa montre avec l'autre main, un sourire attendri dessiné sur ses lèvres. Il regarda l'heure et...

"merlin!"

Koshi avait sursauté.

"KOSHI!!!! C'est quoi ça??? Il est neuf heures et quart!!! Espèce de boulette! La poisse! Encore un coup du numéro 13!"

Il lui lança un regard noir signifiant "Tu voulais manger une libellule ce midi, c'est ça? Bah VA CREVER!" avant de la poser violemment sur la table de chevet.
Cinq minutes avant le début de son cours... lui qui voulait prendre une douche... le garçon enfila rapidement les premiers vêtements qui lui tombèrent sous la main, ses chaussures, attrappa son sac et rangea sa montre, puis sortit en courant de la pièce -koshi bondissant derrière lui, affreusement génée, pour tenter de le rejoindre-...



Passant en quatrième vitesse devant le refectoire, le théâtre et le sauna -Koshi était bien tentée de s'arrêter pour une pause farniente au vivarium, mais Tako s'inquiètereit sûrement pour elle par la suite...- avant d'arriver à l'escalier menant au quatrième, qu'il dévala en quelques secondes.

*J'espère qu'elle sera de bonne humeur, j'espère qu'elle sera de bonne humeur...*

Arrivant devant la salle de cours, Takoru s'arrêta net, pour reprendre son souffle -Koshi entra en collision avec sa jambe droite- et se recoiffer vite fait.

"Bonjour Mademoiselle! Je vous prie d'excuser mon retard..."

Le jeune garçon était entré prestement dans le cours et immédiatement incliné en signe de respect et d'excuses. Il se redressa, et alla s'asseoir au quatrième rang, vers le centre de l'arc de cercle.

1 4 3 5 6 8 5 7 9 2 3 4 6 2 4 1 6 8 4 7 1 1 9 8 2 3 5 6…

Sur la feuille de Joel, une panoplie de chiffres. Une pluie de chiffres, des chutes de 1 et de 2 et de 3 et de 4 et de 5 et de 6 et de 7 et de 8 et de 9. Des chiffres? En voulez-vous, en voilà. Beaucoup. Une fois la feuille remplie, pas au hasard non, mais dans un ordre très précis, suivant des calculs encore plus précis, et même une forme précise, Joel admira la chose, puis se remit à la tâche. Mais il y eut la voix, cette voix qui, malgré sa familiarité, sonnait toujours comme une douce mélodie aux oreilles du poufsouffle, comme une cloche qui résonnait dans sa tête-temple du chiffre, une cloche… Aaaaaah…. Concentration! Con-cen-tra-tion, concentration c’est le jeu! Lalalalala! Aller, au boulot! Il fallait profiter du retard de ces impertinents élèves, doubles demi-portions trop bêtes pour arrivées à l’heure, afin d’achever ce chef d’œuvre. Entre-temps, une petite demoiselle fit son entrée, retardataire numéro un! Et elle avait eut une de ces déductions… Enfin bref, pas la peine de se déranger, Joel continuait, continuait, persévérant, étant devenu une véritable calculatrice vivante et tout ça, TOUT ce-la, dans un but ultime, unique, visant une personne en particulier.

Au sourire de mademoiselle Klimt, Joel sourit également, soupirant intérieurement. Victime encore une fois de ses coups de foudres passionnels, depuis longtemps cette fois, il s’efforcerait de ne point s’en tenir à la platitude ses amours précédentes, soit celles qui avaient inclues une fraise (qui avait viré au vinaigre...), une étoile filante étrange (qui finalement s’était avérer être un avion moldu qui avait aboutit dans l’océan), Marilyn Monroe (qui hélas était décédée…) et une fleur (qui avait séché). Du reste, c’était… futile et embarrassant. Et maintenant qu’il avait tourné la page à ses échecs, msieur Blackburn pouvait se consacrer corps et âme à une aventure nouvelle. Iiiiiiiiihhhaaa!

Entre-temps, retardataire numéro deux avait fait son entrée. Et alors? Bah rien. Joel désormais repassait avec sa plume sur quelques chiffres en particulier, et ce depuis un bon moment maintenant.
Et enfin, eeeeenfin, le chef d’œuvre, l’œuvre promise, fut achevée par le faiseur de merveilles, un portrait ma foi, que trop bien réussi. Parmi les cascades de chiffres apparaissait nettement un visage, composé de chiffres également, mais plus foncés. L’effet était réussi. Et le visage? Aisément, l’on reconnaissait celui de Karolina Klimt. Et d’ailleurs au bas du parchemin, sous chaque cascade de chiffres apparaissaient des lettres, soit celles composant Mademoiselle Klimt, et chaque lettre était le résultat d’un complexe calcul créé par Joel.
Ce dernier, satisfait, retourna le morceau de parchemin et le glissa sur un coin de son bureau. Puis posa sagement ses bras sur sa table et attendit, toutes sortes de folles idées en tête.